« Les jeunes m’ont déçu. Ils meurent trop tôt. On n’a pas le temps de s’attacher à eux. »
Ainsi s’exprime le narrateur anonyme des Mémoires d’un vieux con, artiste de génie aux talents multiples qui traversa le xxe siècle en fréquentant tous les plus grands, inventant au passage le glissisme, le ponctualisme et le cubisme (à plusieurs reprises !). Lorsqu’il n’écrit pas le Manifeste du surréalisme ou Histoire d’O, il peint Guernica ou compose Porgy and Bess. Sans lui, ni Méliès, ni Picasso, ni Breton, ni Malraux, ni Trotski, ni Warhol, ni... (voir la « liste des noms cités » en fin de volume) ne seraient devenus ce qu’il sont.
Les Mémoires d’un vieux con offrent la parodie définitive et sonnent le glas d’un « genre littéraire » qui est une véritable plaie : les mémoires prétentieuses. Une uvre de salubrité publique !
Roland Topor (1938-1997) : peintre, dessinateur, écrivain, dramaturge, poète, chansonnier, cinéaste, acteur, photographe, etc. Remarqué très tôt pour ses étranges dessins au graphisme original (dans Arts, Bizarre et Hara-Kiri), il reçoit le prix de l’Humour noir dès 1961 et crée le mouvement d’avant-garde Panique avec Arrabal, Jodorowsky et Olivier O. Olivier.
Son premier roman, Le Locataire chimérique, sera adapté au cinéma par Roman Polanski ; son deuxième, Joko fête son anniversaire, recevra le prix de Flore en 1970 ; il écrira aussi des recueils de nouvelles, des pièces de théâtre et des livres concepts.
Du long-métrage d’animation La Planète sauvage (avec René Laloux, prix spécial du Jury à Cannes en 1973) au meilleur film sur Sade, l’étonnant Marquis (avec Henri Xhonneux), en passant par les émissions télévisées Merci Bernard, Palace et Téléchat, Topor marquera également de son empreinte le cinéma et l’audiovisuel.
Certaines de ses images (affiches pour Amnesty International ou les films L’Empire des sens et Le Tambour) ont fait le tour du monde, toujours relevées d’un humour noir féroce.
« De son vivant, Topor vendait peu de tableaux, en donnait beaucoup, ses livres faisaient des bides, ses pièces des scandales, ses films faisaient hurler les critiques, et tout cela le rendait hilare : qu’est-ce que vos parents ont été cons ! Dépêchez-vous de (re)découvrir ou même relire tout simplement ces petits bijoux d’un des génies du XXe siècle. Avant que trente crétins, par leur silence, ne nous l’enterrent pour de bon. » (Yves Frémion, Fluide glacial)
“ À présent, je suis un vieil homme, mais mon pouvoir de séduction n’en est pas moins vif. Au vernissage de Jasper Jones, hier soir, à Beaubourg, toutes les femmes présentes n’avaient d’yeux que pour moi.
Mon secret ? Rester compétitif.
Voir beaucoup d’expositions, car, on ne le répétera jamais assez, rien ne vaut la marche à pied pour maintenir la forme. Lire, car il faut savoir se reposer après l’exercice. Ne manger et ne boire que du bon. Et avoir de fréquents contacts avec la jeune génération pour étouffer dans l’uf tout complexe d’infériorité à propos de l’âge. Je vous assure que lorsque je vais me regarder dans mon miroir, après avoir vu deux ou trois jeunes cons, ça me fait du bien.
Vieux con, soit, mais toujours vert ! ”
« Quelle allure aurait le XXe siècle sans Roland Topor ?
Une chose est sûre : il en aurait beaucoup moins. Il n’y a qu’à lire ses Mémoires d’un vieux con, dont le vieux con de
héros, ce zéro, raconte avoir couché avec Sarah Bernhardt, bu des coups avec Lénine, soufflé
à Orwell l'idée d'un roman qui se passerait en 1984, papoté avec Lévi-Strauss et inventé
le cubisme sous le nez de Picasso qui lui a tout piqué. À côté Malraux, qui naturellement l'admirait
beaucoup, fait figure de moine bénédictin ; et BHL lui-même semble jouer petit bras. (...) Un délirant
chef-d’uvre du name dropping égotiste. » (Grégoire Leménager, Le Nouvel Observateur)
« Enregistrées au magnétophone et retranscrites par l’auteur en 1975, les Mémoires d’un
vieux con, dans leurs vraisemblances et invraisemblances, rappellent la fiction totale qui se cache derrière les vies les plus
soi-disant exemplaires et rendent toutes les autres autobiographies d’artistes illégitimes. Elles participent de la
ridiculisation du monde entier pour reprendre l’expression de Jean-Paul et personne ne doit être
épargné de ce manège apocalyptique et comique. » (Pacôme Thiellement, Chronic’art)
« “Mémoires d’un vieux con, c’était ça, une réaction épidermique
à cette sorte de show-business de l’art”, expliquait Topor dans un entretien à Libération
(16 mars 1986). Mais aussi une parodie par accumulation d’arrogance, une satire de la vanité, qui pousse à conter
ses souvenirs par le menu comme si l’Histoire en dépendait. » (Frédérique Roussel, Libération)
« Le narrateur est un con... Dieu merci, il n’est pas l’auteur. Si le premier est assurément un con, le second,
Roland Topor, est un virtuose de l’humour qui nous livrait, en 1975, ces Mémoires inventées. Un classique du genre
aujourd’hui réédité chez Wombat. » (Fabien Simode, L’il)
« Une grandiose parodie de la prétention humaine » (Christine Ferniot, Télérama)
« Les Mémoires d’un vieux con sont un chef-d’uvre que tout artiste contemporain devrait
avoir lu pour ne pas se perdre. » (Alexandre Devaux, Arnet.fr)