La politique vous ennuie ? Ce livre est fait pour vous !
Du premier politicien de l’ère préhistorique, un certain Blab le Lourdaud, aux campagnes télévisées modernes, le professeur Roger Price met à nu la logique absurde du système électoraliste, basé sur le clientélisme et la corruption, qu’il pousse à l’extrême en fondant le parti « Moi d’abord ».
Son credo : le pur intérêt égoïste.
Invitant tous les électeurs avides de pognon à rejoindre le mouvement, il livre son programme – par exemple, l’impôt sur le revenu progressif mais à l’envers (« pour faire cracher les pauvres ») –, ainsi qu’un véritable manuel du militant, détaillant les techniques de trucage des sondages et des urnes, l’art de gérer les conférences de presse d’un candidat débile, ou encore les différentes manières de se défendre face à la menace des petits hommes verts…
Déjà inventeur de la désopilante théorie « pro-fainéantise » de l’Évitisme, qui s’attaquait aux racines de l’utilitarisme et du travail, l’humoriste loufoque Roger Price signe ici une parodie décapante de manifeste politique, sapant avec un humour aussi acerbe que réjouissant le fondement même de nos systèmes politiques.
Humoriste américain, Roger Price (1918-1990) débute dans les night-clubs et à la radio, où il écrit pour les stars comiques de l’époque, avant de publier en 1951 Le Cerveau à sornettes (Wombat, préfacé par Georges Perec), manifeste illustré exposant son hilarante théorie de l’Évitisme, suivi quelques années plus tard de son équivalent en politique, traduit pour la première fois en français : Votez « Moi d’abord » !
Price est aussi le créateur des Droodles (voir l’anthologie Un Mexicain sur son vélo et 119 autres droodles, La Table ronde), devinettes dessinées qui lui ouvriront les portes de la télévision en 1954, et des Mad Libs (avec Leonard Stern) pour le fameux magazine Mad d’Harvey Kurtzman.
Les politiciens sont la branche la plus ancienne connue de l’espèce humaine ; on en trouve de tout temps et dans tous les coins du monde, civilisé comme non civilisé. On les repère plus aisément au cours de ce qu’on appelle l’« année électorale », quand, pour des raisons encore mal connues, sinon d’eux-mêmes, ils se déversent en masse des montagnes et des plaines et, tels des lemmings, tentent de se ruer tous à la fois dans la législature.
Cette vision terrible, lorsqu’on en est témoin, n’est pas de celles qu’on oublie facilement.
Voici à quoi vous pouvez reconnaître un politicien :
Apparence physique
Le manteau est généralement d’alpaga ou bleu foncé à rayures fines. Les mâles adultes sont cependant doués du pouvoir protecteur de changer de couleur pour se fondre dans l’environnement, en adoptant la teinte de n’importe quelle espèce qu’ils côtoient, revêtant des Stetson, des jaquettes, des bleus de travail, des casques de mineurs ou des coiffes indiennes dès qu’il veulent faire connaître leur candidature. Les bras des politiciens, qui sont inhabituellement longs, leur servent à des techniques d’attaque hautement spécialisées comme la « poignée de main » et la « tape sur l’épaule », contre lesquelles un individu isolé se trouve dans la quasi-impossibilité de se défendre. Les jambes sont souples et plutôt arquées afin de pouvoir faire le grand écart sur telle ou telle proposition..
Habitat
Jamais très loin d’un tiroir-caisse public. Cela permet au politicien de protéger sa famille en la dissimulant sous des emplois fictifs. Lorsqu’il sent son foyer menacé, le politicien peut devenir étonnamment dangereux et se mettre à balancer de la boue et des insultes en se cachant derrière son immunité parlementaire. La manière la plus sûre d’observer des politiciens est de se bâtir un abri à proximité d’un sophisme basique, autour duquel on sait qu’ils se réunissent à intervalles réguliers, pour faire obstruction et/ou débattre.
Sociologie
Au cours de ses premières années, le politicien est conditionné à penser constamment en termes de loyauté indéfectible envers lui-même et son espèce, indépendamment de toute « affiliation à un parti » à laquelle il pourrait souscrire ultérieurement. Quand il atteint la maturité, il doit rejoindre un comité où on lui apprendra à « couper dans les crédits », à « émettre des communiqués de presse », à « maudire les communistes » et à « défendre des prérogatives ». Le sens exact de ces rituels n’est pas connu, mais on pense qu’ils ont une signification religieuse. Le vrai politicien est soutenu moralement par la croyance qu’il ne mourra jamais. Il croit en effet que, lorsqu’il atteindra un âge extrêmement avancé, il sera emporté par une vague d’acclamations jusqu’au Sénat, où il passera l’éternité à parler, parler, parler, parler, parler…