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couverture Le Règne hystérique de Siffoney Ier, roi d’Irlande

Spike Milligan

Le Règne hystérique de Siffoney Ier, roi d’Irlande

Un grand roman nonsensique, irrévérencieux et ravageur, signé par l’enfant terrible de la littérature comique anglaise.


Ouvrier au cul d’une bétonnière sous la pluie d’un faubourg londonien gangréné par le National Front (dont le programme politique se résume à : « J’vais t’exploser la tronche, fumier »), Mick Siffoney serait-il en réalité un descendant des rois d’Irlande, comme son père le lui a juré, couché sur son lit de mort ?... Voilà donc la famille Siffoney au grand complet – avec femme, enfant, chien péteur et perroquet bavard (« Touche pas ta bite, matelot ! ») – qui débarque dans son village natal de Deghooleen pour reconquérir sa couronne. Comme si l’Irlande n’avait pas déjà assez de problèmes comme ça !

Car à Deghooleen on croise pêle-mêle un Hongrois exhibitionniste en situation délicate (que faire dans un camp naturiste ?), deux hindous en goguette, un policier qui se transforme la nuit en « chanteur fantôme », forçant ses victimes à l’écouter sous la menace, un cheval de course shooté à la benzocaïne kidnappant ses kidnappeurs, sans compter l’habituelle cargaison d’ivrognes, de pervers, d’arnaqueurs et de crétins patentés qui font le charme de la Perfide Albion comme de la Verte Érin. C’est le début d’une saga rocambolesque, entrecoupée des rêves de gloire héroïque de Siffoney, tout droit sortis de Sacré Graal !... Dans ce roman comique au souffle irrésistible, servi par un style pétaradant d’inventions verbales, toutes les classes sociales, ethnies et religions, tous les travers humains sont passés à la moulinette d’un humour ravageur dont les dérapages sont rattrapés in extremis par l’inimitable sens de l’absurde de l’auteur. Cocktail détonnant mêlant allègrement la misanthropie d’un Jean Yanne à la folie littéraire d’un Flann O’Brien, ce jeu de massacre, féroce et hautement réjouissant, est une lecture garantie 100 % antimorosité !


Traduit de l’anglais par Béatrice Vierne

Couverture de Winshluss

« Les Insensés » nº22


Parution : 3 septembre 2015

Grand format – 320 pages – 20 €


Ce livre existe aussi en e-book (formats ePub et PDF web) au prix de 12,99 €

Spike Milligan


© DR

Né en Inde, irlandais d’origine, Spike Milligan (1918-2002) est considéré comme le plus grand auteur comique anglais de la seconde moitié du XXe siècle, aussi populaire en Grande-Bretagne qu’un Coluche ou un Desproges en France.

Jeune soldat pendant la Seconde Guerre mondiale, puis musicien dans un orchestre de jazz, il devient dans les années 1950 le scénariste et l’une des vedettes, avec Peter Sellers et Harry Secombe, du « Goon Show », émission radio déjantée de la BBC, admirée aussi bien par Marcel Gotlib que par les Monty Python (« Spike Milligan est notre Dieu à tous », dixit John Cleese).

Comédien et écrivain prolifique, auteur de nombreux pastiches (de la Bible à Robin des Bois) et de plusieurs romans (dont Le Règne hystérique de Siffoney Ier, roi d’Irlande, Wombat, 2015), il inaugurait avec Mon rôle dans la chute d’Adolf Hitler ses « Mémoires de guerre », son œuvre la plus lue outre-Manche.


Extrait d’un entretien entre Marcel Gotlib et les Monty Python réalisé en 1980

Gotlib : Quels sont vos « maîtres » en humour ?

Terry Jones : Puisqu’on est en France, je dirais Jacques Tati. Et un comique anglais, Spike Milligan.

Gotlib : Je l’ai rencontré une fois, on a dîné ensemble.

Terry Jones : Le « Goon Show » a été immensément important pour nous.

Gotlib : Il y a cinq ans, quand on a commencé Fluide glacial, je voulais adapter les sketchs du « Goon Show » en bande dessinée. J’ai eu un rendez-vous avec Spike Milligan à Londres, il était d’accord. Mais quand je m’y suis mis, je me suis rendu compte que je n’y arriverais pas. C’était trop difficile, trop anglais.

Eric Idle : Les gags qu’ils avaient sur le « Goon Show », c’était le plus souvent des gags « à combustion lente ». Il ne se passait rien. Je n’ai pas souvenir d’avoir ri aussi fort devant une autre émission. Je les trouvais hystériques. Surtout, ils allaient loin. Cette idée de prendre des risques avec les gags, c’était quelque chose qu’on admirait tous.


© Propos recueillis par Jacques Diament. (Source : Schnock nº12)


Les livres de Spike Milligan aux Nouvelles Éditions Wombat

Le Règne hystérique de Siffoney Ier, roi d’Irlande

Mon rôle dans la chute d’Adolf Hitler (plus d’infos)

Opération Renard du désert (plus d’infos)

Extrait 1

“ C’était le 17 mars, jour de la Saint-Patrick, que Deghooleen fêtait son saint favori. Le pub à l’enseigne du Saint Érudit tremblait sur ses fondations devant l’assaut des masses alcooliques. Des Irlandais, serrés en grappes fumantes, gisaient, hébétés, dans toutes sortes de positions grotesques, avec sur le visage des sourires radieux et imbéciles sous de violents strabismes. Par les deux bouts, ils exhalaient une brume de whiskey n’ayant été consommé qu’une fois ; une seule allumette aurait pu déclencher la première bombe atomique celte. À l’intérieur du pub, d’autres Irlandais s’entraînaient pour aller rejoindre au plus tôt, sur le trottoir devant l’établissement, leurs camarades ivres morts. À intervalles réguliers, entre deux bribes de chansons à boire, on sortait de nouveaux corps qu’on laissait choir avec un bruit sourd sur le trottoir en question. Selon un rite remontant à la nuit des temps, les poches de chacun étaient dûment vidées. Pour reprendre un vieux dicton en vigueur à Deghooleen : « Corps inconscient n’a pas besoin d’argent. » Tous les stocks d’alcools forts ayant été consommés, on lampait désormais un breuvage fabriqué dans une baignoire, qui avait le goût de combustible à briquet, assaisonné d’une bouillie de cloportes. ”


© Spike Milligan Productions, Ltd/ Nouvelles Éditions Wombat, 2015.

Extrait 2

“ Thomas Siffoney 1600-1676 gisait sur son lit de mort.

Pis encore, il était bel et bien en train de mourir. Quarante années d’ivrognerie portaient enfin leurs fruits. Son foie avait déclaré forfait, suivi de près par ses reins, son estomac et ses intestins, si bien qu’il était désormais tout à fait creux. Étendu immobile, un sourire béat éclairant son visage hirsute, il fredonnait un petit air.

— Il n’a plus que deux jours à vivre, chuchota O’Crotty, le médecin.

— Il peut boire un dernier coup ? questionna Mme Siffoney.

— Non, murmura le praticien, ça le tuerait. Moi, en revanche, ça ne me fera pas de mal – et de lamper le verre d’une seule traite. Je reviendrai le voir demain, marmonna-t-il.

— Oui, mais lui, est-ce qu’il vous verra ? riposta Mme Siffoney.

Les échos de la voiture à âne du médecin résonnèrent jusque dans la chambre avant de s’éteindre au loin.

Siffoney 1600-1676 s’assit dans son lit : plus que quarante-huit heures à vivre !

« Ceci est mon testament, écrivit-il. Allez tous vous faire foutre ! Signé : Thomas Siffoney. »

Plus que quarante-huit heures à vivre. Il se versa une rasade de poteen...

Plus que trente-six heures à vivre ! Sans tarder, il se servit une pinte entière de poteen...

Plus que vingt-quatre heures à vivre. Il vida la bouteille et attendit...

Plus que seize heures à vivre... Il n’y avait pas de temps à perdre. Une bouteille et demie s’engloutit avec des gargouillis au fond du gosier du mourant 1600-1676...

Plus que huit heures à vivre. Juste le temps d’écluser une autre bouteille...

Plus que sept, six, cinq, quatre heures et deux bouteilles, trois, deux, une heures, au revoir tout le monde !

À présent, ça faisait cinquante-neuf heures, il était mort depuis onze heures et il avait encore trouvé le moyen de vider une autre bouteille et demie.

Benedict, le croque-mort, fit son entrée :

— Bon Dieu, Thomas, dit-il, t’es pas encore décédé ? Regarde donc l’heure qu’il est, mon gars !

Siffoney 1600-1676 s’assit sur son séant et mit la bouteille à sec.

— Je fais de mon mieux, pourtant. À la tienne !

O’Crotty, le médecin, secoua la tête et fit une pause, mais il ne voulut pas revenir sur sa décision :

— Je ne comprends pas ce qui le maintient en vie, chuchota-t-il.

— Je crois que c’est la poteen, répondit Mme Siffoney.

— Dans ce cas, il ne faut pas la laisser traîner à sa portée, sans ça il est foutu de ne jamais mourir, le bougre, grommela O’Crotty. Je vais déjà emporter ces six bouteilles à des fins d’analyse.

— J’ai le cercueil là-dehors, annonça le croque-mort.

— Alors, dans ce cas, apporte-le donc ici, intervint Siffoney, ça me fera moins loin.

— Ah ! pour une belle et solide boîte à défunt, c’est une belle et solide boîte à défunt ! s’écria Mme Siffoney quand Benedict revint dans la pièce, le cercueil sur son dos, titubant sous le poids.

— Et je peux te dire qu’elle est vachement lourde, cette saloperie, déclara-t-il en la laissant glisser au sol.

— C’est pour moi, ça ? demanda Siffoney 1600-1676 avec un sourire épanoui.

Benedict ôta le couvercle, laissant voir l’intérieur de satin rose.

— Je vais pas pouvoir le bloquer bien longtemps, ce cercueil, avertit-il. Y a une quantité de gens qui attendent pour mourir. T’as l’intention de durer encore combien de temps ?

Mme Siffoney eut alors une excellente idée : et si son mari allait s’installer dans le cercueil, afin qu’ils invitent les voisins à venir le voir ?

— Bon Dieu de bois ! Il est plus confortable que mon propre lit, s’écria Siffoney en prenant place dans l’intérieur capitonné. Et il me va comme un gant en plus. Attendez, je vais m’exercer à croiser les mains.

Ce fut une merveilleuse soirée ; le feu de tourbe rougeoyait, parfumant la pièce, et Siffoney, assis dans son cercueil, chantait avec ses voisins, tandis que ses créditeurs attendaient.

— Ah, Siffoney, mon gars, tu vas nous faire un macchabée de toute beauté, assura l’un d’eux.

Dan Dillon, son voisin, se leva – quatre-vingt-six ans aux prunes, droit comme un I, se portant comme un charme, au point de n’avoir jamais vu un médecin de sa vie.

— Tu permets que je l’essaye un peu, ton cercueil ? demanda-t-il.

— Tout le plaisir est pour moi, lui dit Siffoney en évacuant la bière.

Dan Dillon se laissa glisser dans la boîte béante.

— Comment vous me trouvez ? demanda-t-il, ce qui lui valut une ovation générale.

Dan la fit taire d’un geste de la main.

— Bah, c’est rien du tout, dit-il modestement.

— Dan, il te va encore mieux qu’à Siffoney, lui certifia sa propre épouse.

— Avec des cercueils de cette qualité, fit remarquer Siffoney, c’est pas demain la veille que le décès passera de mode.

— Ça non, renchérit Dan. Je peux te dire que je regrette bien que ça soye pas moi qui suis sur le point de casser ma pipe.

Nouvelle salve d’applaudissements.

— Essaye donc un peu de fermer les yeux pour voir, lança sa femme.

Quelle bonne idée ! se dit Dan. Il les ferma aussitôt bien hermétiquement et s’allongea.

— Cré bon sang, on s’y croirait pour de bon, dit-il, salué par une nouvelle tempête d’applaudissements, suivie de cris extasiés :

— Ce bon vieux Dan !

Les larmes montèrent aux yeux de Benedict, le croque-mort. C’était une fameuse nuit pour les cercueils.

Soudain, Dan Dillon se tint parfaitement tranquille, car, à quatre-vingt-six ans aux prunes, droit comme un I, se portant comme un charme, au point de n’avoir jamais vu un médecin de sa vie, il venait de trépasser. Ce ne fut que bien des bouteilles plus tard que l’on s’aperçut que le cher Dan Dillon était non pas ivre mort, mais bel et bien mort tout court.

— Laissons-le donc jusqu’à demain matin pour voir si ça lui passe, lança Mme Dillon en partant.

Les invités sortirent en trébuchant dans la nuit noire et poisseuse et se dirigèrent au radar vers leurs demeures, abandonnant l’aspirant cadavre avec un macchabée confirmé.

— Ah, Dan, mon vieux copain, conclut Siffoney 1600-1676 en vidant la bouteille, tu sais pas ce que tu rates.

Dans la lumière matinale, O’Crotty le médecin se pencha sur la dépouille de Dillon.

— Ou cet homme est mort, ou c’est un imitateur hors de pair, chuchota-t-il.

La Bible nous dit : « La mort vient comme un voleur dans la nuit. » Mais pas cette fois-là. ”


© Spike Milligan Productions, Ltd / Nouvelles Editions Wombat, 2015.

La presse à propos du Règne hystérique de Siffoney Ier, roi d’Irlande

« Spike Milligan (1928-2002) est un écrivain anglais qui ne connaît pas la retenue. Il a envie d’en découdre avec tout le monde. Il déstabilise les imbéciles avec des bonnes questions. Avec lui, la vulgarité tend au sublime... À ceux qui disent soyons sérieux un instant, Spike Milligan répond que c’est un instant de trop. » (Les Chroniques d’Alfred Eibel)

« Imaginez un Flann O’Brien (dont il est question d’ailleurs) ayant mélangé la Guinness et les amphétamines et laissé libre cours à son imagination. Le résultat aurait pu être quelque chose dans le style de ce livre de 316 pages et 61 chapitres ! Dès la première ligne, le ton est donné : “Au commencement Dieu créa le ciel et la terre, avec l’aide, semble-t-il, d’une main-d’œuvre irlandaise”... Un chef-d’œuvre ! Le livre le plus délirant lu cette année ! Une lecture qui fait énormément de bien ! » (blog EIREann, Littérature d’Irlande, de Bretagne et d’ailleurs)

« Nulle part ailleurs vous ne trouverez une telle concentration de blagues par paragraphe. » (Bernard Quiriny, Trois Couleurs)

« Le roman narrant leur quête est l’occasion de multiplier les gags plus délirants les uns que les autres. Ça n’arrête pas, ça fuse, ça swingue et on digère à peine une blague qu’une autre la remplace. Humour anglais à tous les étages, l’auteur, complice de Peter Sellers sur le fameux Goon Show, star dans son pays, est adulé aussi bien par Gotlib que par les Monty Python. A must of British Humor ! » (Jean-François Caritte, Psikopat)

« En somme, Spike Milligan signe une parodie d’odyssée, bien loin de l’Ulysse de James Joyce mais plus drôle ; une fiction parsemée de jeux de mots, de noms à la gomme et d’incidents loufoques. Bref, du Milligan garanti pur malt. » (Marc-Olivier Parlatano, Le Courrier)