Apprenez à ne rien faire ! avec un des livres les plus fous et les plus drôles de la littérature américaine du xxe siècle.
Pourquoi s’adapter alors que c’est la civilisation qui est inadaptée ? Pourquoi s’activer quand on peut l’éviter ? Et comment s’exercer à ne rien faire ? Après des années de recherches approfondies en anthropologie, en psychologie, en laboratoire et sur Mlle Patricia Delray, l’auteur fonde dans ce livre les bases d’un mouvement révolutionnaire : l’Évitisme. Il nous raconte aussi le destin tragique de Melvin Ouk, l’inventeur de la roue, pionnier du cauchemar mécaniste actuel, et nous emmène en expédition chez les sauvages blancs du Pópotan, fétichistes de l’argent... Il nous enseigne par ailleurs « Comment combattre efficacement la publicité » ou « Comment les jeunes femmes et autres types de femmes peuvent éviter les hommes qui les enquiquinent dans les lieux publics ». Hilarant manuel illustré de 80 dessins, Le Cerveau à sornettes vous convaincra de rejoindre le Mouvement !
Pamphlet anti-utilitariste virulent et chef-d’œuvre d’humour nonsensique, pionnier « marx-brotherien » de la décroissance et du slow en plein maccarthysme, Le Cerveau à sornettes est un des livres les plus dingos de la littérature US, salué comme il se doit par l’Oulipien Georges Perec.
Humoriste américain, Roger Price (1918-1990) débute dans les night-clubs et à la radio, où il écrit pour la star comique de l’époque Bob Hope, avant de signer en 1951 Le Cerveau à sornettes, qui expose pour la première fois l’hilarante théorie de l’Évitisme. D’autres ouvrages d’inspiration évitiste suivront, dont les Droodles, devinettes dessinées qui lui ouvriront les portes de la télévision en 1954. Ce précurseur de Mad, adoubé par Harvey Kurtzman, créera aussi les Mad Libs pour le célèbre magazine d’humour, qu’il poursuivra plusieurs décennies durant avec son complice Leonard Stern.
« Il y a un an à peine, l’auteur de ce livre était un jeune homme pâle, nerveux et constamment soucieux.
Il l’est toujours. Il l’est même plus, car entretemps il a écrit un livre que ni lui, ni son éditeur ne sont capables de décrire. C’est une situation inextricable, car si personne n’est capable de le décrire et qu’il n’apparaît sous aucune catégorie connue, comment les historiens du futur pourront-ils le dénicher ? Et si les historiens du futur ne le retrouvent pas, comment ce livre pourra-t-il passer à la postérité ? Et si la postérité ne l’achète pas, comment les descendants de l’auteur pourront-ils subvenir à leurs besoins ? Voilà le genre de chose qui rend Roger Price si nerveux.
On ne peut hélas rien y faire, à part dire que ce livre est à notre avis formidablement drôle et original. Et aussi vous donner le conseil suivant : il existe un risque, minime mais réel, qu’un lecteur trop sensible s’étrangle de rire en lisant ces pages. Alors soyez prudent. »
“ Lors de mes tournées de conférences, où que je me rende, un flot continu de gens tourmentés et anxieux vient m’interroger : « Comment puis-je atteindre la paix de l’esprit ? », « Comment puis-je trouver le bonheur et la sécurité dans ce monde complexe ? », « Où sont les toilettes pour hommes ? » et diverses autres questions dont l’importance ne le dispute qu’à l’urgence.
La réponse que je donne invariablement est : « Phi-lo-so-phie ».
Et je peux vous assurer, à la lueur étrange que je vois naître au fond de leurs yeux et à la manière dont ils s’éloignent en vitesse, qu’au plus profond d’eux-mêmes ils savent ce que je veux dire.
Nous devons trouver de nouvelles réponses. La Science a échoué à nous offrir des réponses. La Politique a échoué. La Compagnie de voitures électriques Tom Swift (Moline, Illinois) a échoué. Les cachets d’Aspirine ont échoué ! Le monde a besoin d’une philosophie nouvelle, fondée sur une éthique nouvelle.
J’ai élaboré cette philosophie.
Elle se nomme l’Évitisme. ”
“ Question – C’est méchant, Roger Price, vraiment ?
Réponse – C’est très méchant.
Q. – C’est aussi méchant que Mad ?
R. – C’est beaucoup plus méchant que Mad. D’ailleurs, Roger Price, c’était le maître à penser de Mad.
Q. – C’est aussi méchant que Tex Avery ?
R. – C’est aussi méchant que Tex Avery.
Q. – C’est aussi méchant que les Marx Brothers ?
R. – Oh ! là, là ! C’est tellement méchant que c’est presque aussi méchant que Karl Marx... ”
« Humoriste américain né en 1918, Roger Price faisait semblant en 1951 de présenter sa grande théorie de développement personnel : l’Évitisme, religion du moindre effort et des fourmis dans les pieds à trop rester dans son rocking-chair. Illustrés à main levée et assortis de commentaires délirants, ses chapitres s’enchaînent et revendiquent haut et fort le droit d’être absurdes et rigolards à l’ère du positivisme. Une lecture à conseiller aux cadres dynamiques. » (François Perrin, TGV magazine)
« Voici une option radicale, déraisonnable, stupide, plus exigeante qu’il n’y paraît, pour être heureux sans travailler. En quoi consiste l’Évistime ? À éviter. Les choses, les événements, les questions, les choix, les actes... À éviter d’exister. À “éviter l’effondrement de votre personnalité en la supprimant”. (...) Dans son absurdité et son ambivalence, la tentation de l’Évitisme invite à de reposants pas de côté. Et, allez savoir pourquoi, les chemins obliques semblent toujours plus attirants que les lignes droites. Et plus gais. » (Catherine Portevin, Philosophie magazine)
« Le principe de l’Évitisme est simple : un Évitiste évite les choses, tout simplement. Il les évite car “le non-évitement conduit à l’implication, source de tous les problèmes de l’homme”. Vous suivez ?... L’Évitiste ne pratique aucun sport, évidemment, et il réfléchit très peu. Sa devise ? “Un esprit mou dans un corps flasque”. Sa discipline : tout remettre au lendemain. Comme dit Price, “ne remettez pas à demain de remettre les choses à demain. Remettez les choses à demain aujourd’hui”. Pour illustrer cette théorie qui n’est pas sans rappeler Bartleby, le héros de Melville, Price aborde tous les sujets, avec force digressions improbables et historiettes loufoques, parsemées de petits croquis dépourvus de sens... C’est absurde et très drôle, avec un gag toutes les deux phrases. Derrière l’humour se cache cependant une vraie profondeur. Et si l’Évitisme était une critique des sociétés capitalistes, basées sur le consumérisme et les gadgets ? Et si les délires de Price sur l’invention de la roue étaient une critique de la technique, à la façon d’Ellul ou de Heidegger ? L’Évitisme, derrière son côté gag, n’est peut-être qu’une variante astucieuse du conservatisme d’Edmund Burke ou Benjamin Disraeli, ces génies selon qui la meilleure solution, parfois, consiste à ne rien faire... Quand on voit l’agitation de nos réformateurs et la nullité de leurs résultats, on se dit qu’ils n’ont pas tort. Et Price, avec son flegme militant et son humour carabiné, d’apparaître dans sa vraie nature : une sorte de sage, tout simplement. » (Bernard Quiriny, L’Opinion)
« Méfions-nous des conseils de lecture, volontiers émis par les éditeurs eux-mêmes, qui abusent des qualificatifs “hilarant” ou “désopilant”. Le plus souvent, ces livres ne tireront de nous qu’un pâle sourire si toutefois les moustaches de notre chat nous chatouillent à ce moment-là le creux des genoux. Mais Le Cerveau à sornettes, j’en fais ici le solennel serment, vous arrachera des éclats de rire francs et sonores, même si votre chien au même moment vous arrache pour sa part un mollet. Ce petit traité de l’Évitisme examine et discute scrupuleusement chaque point de cette doctrine révolutionnaire qui pourrait avoir pour inspirateurs Oblomov et Bartleby...
(...) Chacun est donc invité à rejoindre au plus vite son “évitorium” local où il verra naître peu à peu en lui “un sentiment réconfortant de manque de volonté et de faiblesse morale” qui le tiendra éloigné du marché du travail. Impossible d’ailleurs d’embaucher à l’heure puisque le réveil évitiste est constitué d’“une tranche de foie qui vibre entre deux éponges”. Et si les adversaires du mouvement reprochent à ses adeptes de n’être en réalité que des flemmards, Roger Price suggère de leur opposer ce contre-argument cinglant : “C’est vrai.”
(...) Price est un humoriste sceptique pour qui la réalité, si rugueuse soit-elle, reste une convention qu’une démonstration par l’absurde bien conduite doit suffire à ébranler sur son socle. Ce qui est très fort, c’est que la futilité revendiquée de son propos en conforte la légitimité et l’efficacité. Ainsi le livre excède-t-il sa visée première pour devenir, à la manière des manifestes ironiques de Jonathan Swift, une charge féroce contre le système dominant. »
(Éric Chevillard, Le Monde des livres)